La bande à Bonnot est formée de sept chats illégalistes qui habitent avec Anne (Bonnot, Valet, Garnier, Carouy-dit-Kaboum, Monier, Soudy et Callemin-dit-Raymond-la-Science). Lorsqu'ils ne dorment pas, ne répandent pas leurs poils à travers l'appartement ou qu'ils ne remplissent pas les litières, ils conduisent une limousine Delaunay-Belleville volante de 1910 et pratiquent la piraterie dans les rues du Vieuholle et à travers tout le demi-sous-sol.

Si la bande pratique plusieurs formes de reprise individuelle, elle se concentre principalement sur le braquage des commerces et le cambriolage des résidences bourgeoises. Une alliance entre la bande et la C.R.A.S.S.E. a été établie depuis peu, par l'entremise de Selma, leur contact principal : les chats illégalistes leur fournissent des biens de première nécessité et les communistes libertaires leur offrent des planques et un soutien logistique.

Laissons la parole à Raymond-la-Science, qui a été délégué par ses camarades pour expliquer la démarche de la bande :

« Comme la plupart d’entre nous, je subis depuis ma naissance une exploitation aliénante et continuelle. Il n’y a aucun aspect de ma vie où elle n’est pas présente, où elle ne m’écrase pas de tout son poids. Se défaire de cette exploitation, ne serait-ce que temporairement, est presque toujours illégal. Les moyens de vivre (et pas seulement les moyens de subsistance) devraient être librement pris, donnés, partagés. La propriété nous prive des moyens de vivre et nous condamne à la survie. Le droit existe pour protéger la propriété. Vivre ne peut donc être qu’illégal.

Je suis amoral, donc alégal. Je considère les lois et les règles édictées par les classes dominantes comme nulles et non avenues. Je refuse de m’y soumettre, c’est la seule façon de me mettre à vivre pour de bon plutôt que de me contenter de simplement survivre. Etre alégal, c’est agir en accord avec mes propres désirs plutôt qu’en fonction des prémisses établies par la société – et c’est précisément ce qui horripile les représentants de la loi et les braves citoyens conformistes.

Je rejette toute forme de morale, mais ça ne m’empêche pas d’avoir des valeurs et des principes. Chaque fois que je pose un geste illégal, je me demande s’il est conforme à mes désirs, s’il s’accorde avec le mouvement ascendant de la vie, s’il s’inscrit dans le sens de la généralisation de la liberté. Si c’est le cas, pourquoi aurais-je en plus à me conformer à des lois extérieures et transcendantes qui, la plupart du temps, tendent à l’extinction des désirs et à la négation de la vie ?

En cette ère d’hypocrisie généralisée et surmédiatisée, ceux et celles qui n’ont que mépris et dédain pour la loi ne peuvent espérer du troupeau que de la haine. Il doivent s’attendre à être calomniés, à être présentés comme des démons, des terroristes et des ennemis de la société par les bourreaux et les tyrans qui peuvent ainsi se permettre de continuer de perpétrer leurs méfaits ordinaires en toute légalité.

En ce qui me concerne, je suis hors-la-loi, égoïste et amoral. Jamais je ne m’en excuserai, jamais n’aurais-je ne serait-ce que l’ombre d’un remords. Et si on veut faire de moi l’antéchrist, il faudra d’abord qu’on me trouve. »

Inutile de vous dire qu'ils chipotent chaque fois qu'Anne remplit leurs bols de bouffe.